Laëtitia Knopik  Blog diététique-nutrition  Course à pied à jeun : Peut-on courir à jeun ?

Course à pied à jeun : Peut-on courir à jeun ?

Lorsque que l’on googlise le sport à jeun, on tombe sur des vidéos YouTube , des liens qui soit promeuvent le sport à jeun en vue d’une perte de poids, soit vous attirent l’œil avec son « bonne ou mauvaise idée » tout en mettant en avant l’avantage de taper dans le gras. Certains écrivent même des livres dont l’expertise n’est que du « cela a marché sur moi, donc pourquoi pas sur vous », y compris sur des sujets comme « courir à jeun » . Celles et ceux qui me connaissent, savent à quel point l’expérience fait partie de mes principes en matière de conseil diététique. J’invite toujours mes accompagnés à tester seulement s’il juge que cela fait sens pour eux. Mais, car il y a un mais, chaque expérimentation se fait sous couvert de l’expertise que je peux leur donner en me basant sur les différentes formations auxquelles je participe chaque année, aux études ou documents que je lis pour parfaire mes connaissances, y compris sur des sujets comme le fait de courir à jeun. Bref, je suis comme toute professionnelle de la nutrition diététique pour sportifs bien attentionnée, avide de suivre aux mieux les personnes qui me font confiance. Et s’il faut aller droit dans le mur, faisons-le en toute connaissance de cause. Et je ne dis pas que le fasting est mauvais (le fait de s’obliger à une privation en terme d’alimentation et de boisson).

C’est naturellement que parmi ma communauté de sportifs, que ces derniers soient dans l’endurance, ou dans la prise de masse musculaire en vue de performer dans des disciplines dites de force, beaucoup sont attirés par la pratique du jeun intermittent, donc de la course à jeun. Zoom sur mon point de vue.

1. Le jeûne intermittent dans la course à pied

L’idée principale du jeûne intermittent est d’alterner entre une période de jeûne et une période d’alimentation sur une période de 24 heures. L’objectif premier est de permettre au corps un repos métabolique, ce qui signifie que le corps n’est pas engagé dans le processus de digestion pendant une période prolongée. Les adeptes du jeûne intermittent soutiennent que cette pratique offre divers avantages, notamment en facilitant la détoxication de l’organisme, un processus naturel qui se produit principalement la nuit. Selon eux, le fait de ne pas digérer pendant une période de 16 heures permet au corps de se concentrer sur d’autres fonctions métaboliques et réparatrices, ce qui pourrait potentiellement améliorer la santé globale.

Cependant, il est important de noter que la détoxication est un processus normal que le corps effectue avec ou sans jeûne provoqué. L’idée n’est pas de créer un état de privation extrême, mais plutôt de structurer les périodes de jeûne et d’alimentation de manière à optimiser les fonctions corporelles. Pour suivre cette pratique, il est généralement recommandé de jeûner pendant 16 heures et de concentrer la période d’alimentation sur une fenêtre de 8 heures. Durant cette fenêtre, il est crucial de consommer des repas équilibrés et nutritifs pour s’assurer que le corps reçoit tous les nutriments nécessaires pour fonctionner correctement et soutenir les activités quotidiennes, y compris l’exercice physique.

2. Les pour et les contre du fasting

Le jeûne est souvent proposé à des fins thérapeutiques sur divers pathologies et ce, même en la rareté d’études randomisées et contrôlées chez l’homme. L’efficacité du jeûne a, ainsi facilement été démontrée chez les personnes souffrants de surpoids/obésité, les personnes diabétiques, celles avec un bilan biologique par exemple*. Des études de mai 2003 ont montré ces améliorations en diminuant l’apport calorique de 20-50% d’une journée sur sept.
Par contre, rien n’est énoncé concernant la population de départ, à savoir :

  • Est-ce que les apports caloriques étaient supérieurs ou non au besoin?
  • L’alimentation était-elle déséquilibrée ou non
  • Les personnes touchées par le diabète avaient-elles ou non une problématique de surpoids supplémentaire à leur pathologie ?

Bref, cet état de lieux pose encore de vraies questions concernant les bénéfices car de nombreux facteurs manquent à l’appel.

3. Courir à jeun pour le sportif

Il est essentiel de rappeler que pour les sportifs qui pratiquent une activité physique intense, avec 3 à 5 séances par semaine à une intensité moyenne à forte, les besoins énergétiques sont considérablement élevés. La pratique du jeûne intermittent peut poser des défis spécifiques à ces athlètes. En effet, ils doivent concentrer leur apport calorique dans une fenêtre de huit heures, ce qui nécessite plusieurs prises alimentaires. Cela peut conduire à une sensation de gavage, particulièrement gênante si la séance de sport se déroule en milieu ou en fin de journée. La digestion peut être perturbée, entraînant des problèmes digestifs qui nuisent à la performance sportive. La sensation de lourdeur et l’inconfort digestif peuvent réduire l’efficacité de l’entraînement et diminuer les performances globales.

De plus, la concentration des apports nutritionnels sur une courte période peut également perturber le sommeil. Un sommeil de qualité est essentiel pour la récupération et la performance sportive. Si les repas sont trop proches du coucher, l’athlète pourrait éprouver des difficultés à s’endormir ou à obtenir un sommeil réparateur, ce qui peut avoir un impact négatif sur la récupération musculaire et la performance lors des entraînements suivants. En outre, l’impact potentiel sur la récupération peut s’accumuler au fil du temps, rendant les bénéfices attendus du jeûne intermittent moins significatifs pour les sportifs de haut niveau. Il est donc crucial de bien planifier l’alimentation et les séances d’entraînement pour minimiser ces effets négatifs et maximiser les avantages potentiels du jeûne intermittent.

4. L’entrainement au jeûne

Celui-ci est souvent préconisé pour pouvoir taper dans le gras dont la lipolyse démarrerait après quarante-cinq min d’activité. Or des études montrent la mobilisation des graisses après le début d’activité, soit 15 min grâce à la stimulation d’hormones par le pancréas, les glandes surrénales et le cœur.

Donc si l’objectif était celui-ci , cela n’en vaut pas la peine.

Par contre, une partie de la population, et notamment parmi la communauté sportive, a du mal à ingérer quelconque nourriture, la sortie « à jeun » peut être effectué si l’intensité de celle-ci est moindre et ne va pas au-delà des 45 minutes. En cas d’hypoglycémie, ne pas hésitez à consommer une boisson de l’effort et/ou une compote format poche.

Témoignage de sportif

J’ai choisi, ici, de vous partager le retour d’une personne pratiquant une discipline d’endurance à haut niveau qui a voulu se tester au fasting. Clairement, au bout de quelques jours, celle-ci ressentait le manque de « jus », et ses performances se sont amoindries.  Courir à jeun, une bonne idée dans ce cas ?

6. Sportifs souffrant de troubles de comportement

Il est noté quelques signes indésirables pouvant survenir lors d’un jeûne comme l’irritabilité, la somnolence, le renforcement de la fatigue interne, sensation potentiellement ressentie donc lorsque vous courrez à jeun. La pratique du jeûne chez les personnes qui ont un rapport à la nourriture assez compliqué aura tendance à entretenir, voir renforcer ce dit trouble .

Ainsi, la vague de problèmes connue se maximisera avec davantage de restriction calorique et ses carences, sa perte de poids, l’apparition ou l’aggravation des compulsions alimentaires, une estime de soi et de confiance en soi de plus en plus au ras des pâquerettes.

7. Pour aller plus loin sur le fait de courir à jeun

Je vous invite à consulter et lire quelques ouvrages qui ont en partie inspiré cet article sur le fait de courir à jeun :

Extenso.org,

la bible de la préparation physique – Pascal Prévost et Dider Reiss,

l’ultra-performance- Fabrice Khun,

Le jeûne dans la santé et pendant la maladie- ACHAMRAH, Najate, DUPERTUIS, Yves Marc, PICHARD, Claude

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